On profite du printemps qui arrivera peut-ĂȘtre un jour afin de vous dresser un portrait plus complet de ce beau, grand et Ă©nigmatique lĂ©gume printanier.
Historique
On mange des asperges depuis prĂšs de 3â000 ans. On sait, par exemple que les Romains en raffolaient, car elles se trouvent dans un des plus vieux â sinon, le plus vieux â livres de recettes, lâArt culinaire de Marcus Gavius Apicius, publiĂ© au 1er siĂšcle. (Apicius recommande de les Ă©plucher et de les bouillir debout, la tĂȘte en dehors de lâeau â un peu comme les chrĂ©tiens Ă lâĂ©poque).
On doit lâarrivĂ©e de lâasperge dans le Nouveau Monde Ă un marchand hollandais du nom de Diederick Leertouwer, qui aurait introduit lâasperge blanche en Nouvelle-Angleterre au 17e siĂšcle. Plus rĂ©cemment, les Hollandais ont voulu en quelque sorte « boucler la boucle » de leur contribution ancestrale en tentant la livraison dâasperges blanches avec un drone⊠avec un rĂ©sultat assez dĂ©sastreux, merci.
Les diffĂ©rents types dâasperges
Lâasperge Ă©tant ce quâelle est, on compte plusieurs variĂ©tĂ©s aux noms exotico-Ă©rotiques du genre Jersey Knight, Purple Passion, Apollo, Viking KBC, ou la PrĂ©coce dâArgenteuil. Mais on peut, en gros, les regrouper en trois groupes :
Lâasperge verte, quâon connait bien
La blanche, qui nâest pas albinos ou gĂ©nĂ©tiquement modifiĂ©e, mais qui est plutĂŽt une asperge verte quâon a laissĂ© pousser ensevelie dans le sol, causant ainsi son blanchimentâ;
La violette, qui est un peu plus sucrĂ©e, franchement plus exotique et sexy, mais qui devient verte lorsquâon la fait cuire trop longtemps, prouvant quâon ne peut pas toujours se fier aux apparences, mĂȘme dans le monde vĂ©gĂ©tal.Â
Pousse, mais pas Ă©gal
Leur nom poétique vient du perse « asparag », qui veut littéralement dire « pousse », comme quoi les linguistes perses étaient à la fois paresseux et pragmatiques.
Les asperges sont des lĂ©gumes bipolaires : elles prennent trois ans Ă se mettre en branle, mais une fois partie, elles ne sont plus arrĂȘtables, pouvant pousser de 6 Ă 10 pouces en une seule journĂ©e (insĂ©rer votre blague grivoise ici). En effet, la plante vivace prendra deux ans pour dĂ©velopper son systĂšme racinaire qui peut atteindre jusquâĂ 2 mĂštres de profondeur dans un sol de prĂ©fĂ©rence sablonneux, ce qui explique ce crunchy quâelles ont quand on oublie de les laver.
Pour les savourer pleinement, on vous conseille fortement de couper la base Ă environ un pouce.
« à moins de vouloir à tout prix faire soudainement partie de la famille des ruminants », précise notre chef Patrice Gosselin.
Pleine de nutriments
CĂŽtĂ© nutritif, lâasperge ne laisse pas sa place, avec une trĂąlĂ©e de vitamines, fibres, minĂ©raux et aussi des antioxydants de meilleure qualitĂ© que plusieurs lĂ©gumes plus connus, comme lâoignon ou lâail.
+ Autre avantage : lâasperge ne perd pas ses propriĂ©tĂ©s bĂ©nĂ©fiques Ă la cuissonâ; mĂȘme quâelles augmenteraient, Ă condition de ne pas la cuire pendant une heure ce qui, avouons-le, serait plutĂŽt con.
+ Notre chauve chef en profite pour vous rappeler quâil faut « toujours cuire rapidement les asperges, environ une minute, et puis les plonger dans lâeau froide pour arrĂȘter la cuisson et fixer la couleur verte. Parce que nâoubliez pas : lâasperge se mange aussi crue. Eh oui. Coupez-la finement ou mĂȘme en rubans, câest vraiment dĂ©licieux en salade. »
+ De plus, on peut choisir ses asperges selon la recette : « Par exemple, on va prendre des asperges plus grosses pour les griller sur le BBQ, mais plus fines pour une salade. »
Lâasperge dans le monde
La Chine est de loin le plus gros producteur dâasperges, avec plus de sept millions de tonnes mĂ©triques par annĂ©e, suivie du PĂ©rou (376â000 tonnes) et du Mexique (120â000 tonnes). Mais le volume ahurissant dâasperges chinoises sĂšme le douteâ; selon un rapport amĂ©ricain, il serait plus de lâordre de 300â000 tonnes, ce qui prouve quâon ne peut pas toujours se fier aux chiffres provenant dâun pays qui ment mĂȘme au sujet de ses asperges. Chez nous, câest un peu plus de 2â000 tonnes dâasperges quâon Ă©coule chaque printemps au QuĂ©bec, mais une grande partie risque de demeurer dans les champs cette annĂ©e, faute de main-d'oeuvre.
Pourquoi c'est le PĂ©rou
La prolifĂ©ration dâasperges du PĂ©rou sur nos tablettes Ă longueur dâannĂ©e est une consĂ©quence directe de la lutte Ă©pique (et plutĂŽt futile) que font les AmĂ©ricains Ă la drogue. En effet, Ă la fin des annĂ©es 90, dans le but dâencourager les agriculteurs pĂ©ruviens Ă dĂ©laisser la cocaĂŻne pour les asperges, les Ătats-Unis ont largement subventionnĂ© la culture du lĂ©gume dans ce pays dâAmĂ©rique du Sud, incitant plusieurs compagnies amĂ©ricaines comme Del Monte Ă dĂ©mĂ©nager leurs opĂ©rations lĂ -bas.
L'asperge et la COVID-19
Cette annĂ©e, plusieurs festivals dâasperges ont Ă©tĂ© compromis Ă cause du coronavirus, dont le British Asparagus Festival et sa mascotte / porte-parole « Gus », qui est curieusement devenu un sex-symbol Ă la Tom Jones en Angleterre, en plus de crĂ©er un Ă©moi en se pointant Ă lâĂ©glise il y a quelques annĂ©es. Mais on tient Ă vous rassurer, le Symposium international de lâasperge, lui, devrait toujours avoir lieu en Espagne en juin 2021.
Finalement, pourquoi ça sentâ?
Souvent baptisĂ©e du « parfum de pipi », lâasperge a ce don unique de faire sentir sa prĂ©sence mĂȘme quand on cherche Ă sâen dĂ©barrasser. Mais attention, pas pour tous. En effet, une Ă©tude beaucoup trop sĂ©rieuse et exhaustive sur le sujet rĂ©vĂšle que :
1. Ce nâest pas tout le monde qui a le talent digestif de produire une urine aromatique aprĂšs avoir mangĂ© des asperges
2. Ce nâest pas tout le monde qui a le talent olfactif de humer lâasperge une fois Ă©vacuĂ©e
Dans les deux cas, une prĂ©disposition gĂ©nĂ©tique serait requise pour y arriver. Mais peu importe dans quel clan gĂ©nĂ©tique vous vous situez, sachez que lâodeur fait aussi lâobjet dâun dĂ©bat parmi les scientifiques.
Les coupables seraient des molĂ©cules de mĂ©thyl mercaptan ou dâasparagine â ou une combinaison des deux.
Mais dans les deux cas, le tout demeure inoffensif.
Et le tout demeure beaucoup trop dâinformation Ă notre goĂ»tâŠ
(Publié le 8/5/2020)