Cette semaine aux Explorateurs culinaires, on prend le temps de vous dresser un portrait complet d’un aliment qui a meublé nos soirées d’été depuis notre tendre enfance et qui se retrouve désormais partout dans nos vies, à notre insu : le maïs.
1. MONTRÉAL ÉTAIT UN CHAMP DE MAÏS
Le maïs était déjà fermement implanté comme céréale fétiche des communautés autochtones en Amérique du Nord et du Sud depuis plusieurs siècles, mais il n’a fait le saut en Europe et en Asie que lorsque les soi-disant « explorateurs » ont choisi de piller les champs et de répandre la bêtise et la cruauté humaine à des peuples qui n’en demandaient pas tant (mettons). Christophe Colomb, qui a le mérite d’être le premier grand perdu de cette cuvée de pilleurs découvre le maïs à Cuba en 1492 et, toujours convaincu qu’il est en Inde, le baptisera « blé d’Inde ». Cela ne s’arrête hélas pas là : si vous regardez sur une carte géographique, la Jamaïque est à ce jour dans les « West Indies » et le mot « dinde » nous provient de « poule d’Inde ». (Et dire qu’on a des journées fériées et des rues en l’honneur de ce génie.) Plus près de chez nous, Jacques Cartier relate en 1534 qu’Hochelaga (aujourd’hui Montréal) se trouve au milieu de champs de maïs. Vu toutes les erreurs grotesques de ces supposés illustres personnages historiques, on suggère que c’est peut-être de là que nous vient l’expression « être carrément dans le champ. »
4. IL EST PLEIN DE BONNES CHOSES
Dans le royaume céréalier, le maïs est vraiment king, représentant à lui seul environ 40 % de la production mondiale de céréales. Mais il est tout aussi dominant sur le plan nutritif.
Il y a quelques années, la revue Business Insider a comparé les groupes de grains entiers les plus courants à portions égales pour ensuite les classer en fonction de leur densité nutritionnelle — c’est-à-dire la quantité de bonnes choses que vous obtenez pour chaque calorie que vous avalez.
Le maïs s’est classé au 3e rang sur 14, derrière l’amarante (2e) et l’avoine (1er). En plus de contenir 4 grammes de protéines par tasse, le maïs a aussi des propriétés anti-cancer très intéressantes grâce à ses antioxydants. En effet, une étude comparant l’activité antioxydante de quatre grains céréaliers (maïs, blé, avoine, riz) a démontré que le maïs était celui qui en avait le plus. Mieux encore, on a trouvé que l’activité antioxydante du maïs augmentait lorsqu’il est cuit, ce qui n’est pas toujours le cas pour tous les légumes. Ce qui explique aussi pourquoi le maïs n’est, en réalité, pas un légume.
3. LE MAÏS EST PARTOUT
Pourquoi est-il partout ? Avant tout, parce qu’il ne coûte vraiment pas cher à produire. Parce que sa culture est outrageusement subventionnée par les gouvernements, surtout aux États-Unis, qui ont versé 2,3 milliards de dollars en subventions pour le maïs en 2016, soit l’équivalent de deux stades olympiques. Et aussi, parce que grâce à la magie de la génétique, on a réussi à augmenter aux États-Unis sa production de façon exponentielle au fil des ans, passant d’un rendement de 20 boisseaux (bushels) par acre de terre en 1860 à 120 boisseaux en 2010, pour toujours la même surface. Sans surprise, les States sont les plus grands producteurs de maïs avec un rendement de 345 millions de tonnes métriques en 2019-2020.
Donc, avec un pays farouchement capitaliste qui regorge de maïs pas cher, on a mis deux grandes forces occultes à l’oeuvre — la science et l’économie — pour l’utiliser partout : dans les boissons gazeuses et desserts (sous forme de sirop de maïs), dans le plastique, l’éthanol, le ciment, des produits pharmaceutiques, le savon ou encore la peinture, pour nenommer que ceux-là. En fait, on estime qu’il y a près de 4 000 produits où l’on retrouve du maïs.
Ah ! oui, on oubliait : on peut aussi le manger. Mais là encore, surprise, contrairement au blé et au riz, la grande majorité de la production du maïs dans le monde n’est pas pour l’humain, mais sert plutôt à nourrir des bêtes, notamment le bétail. Pourquoi ? Tous ensemble : Parce qu’il ne coûte vraiment pas cher à produire. Et il permet d’engraisser, par exemple, une vache plus rapidement, soit en approximativement 14 mois au lieu de quatre ou cinq ans. Le seul hic : la vache est un ruminant et est incapable de bien digérer le maïs, ce qui fait qu’on doit la traiter avec des antibiotiques pour tous les effets secondaires néfastes que cela peut causer à son système digestif, incluant des ballonnements et des ulcères.
On vous épargne les détails horribles, mais si vous voulez rester bouche bée sur l’omniprésence du maïs dans vos vies, on vous invite à regarder l’excellent documentaire King Corn. Ou notre tout aussi excellent chroniqueur Marc-André Valiquette en cliquant ici.
2. IL Y A DIFFÉRENTES SORTES DE MAÏS
Selon la personne à qui vous parlez (où ce que vous Googlez), on semble classer le maïs en trois ou six catégories / types différents. Question de rajouter une couche de confusion, on a opté pour quatre :
1. Le maïs sucré
La vedette incontestée de nos épluchettes qui est plus sucré donc parfaitement conçu pour l’usage humain.
2. Le maïs denté
C’est le plus répandu, qui sert notamment à nourrir les bêtes, car il contient plus d’amidon et moins de sucre. On le reconnaît par la petite bosse ou cavité qui se forme sur le dessus de chaque grain et par son goût particulièrement dégueulasse.
3. Le maïs soufflé
Un peu comme les humains, ce ne sont pas tous les types de maïs qui éclatent sous pression. Le popcorn qu’on adore (même si on ne sait pas trop de quel liquide visqueux on l’imbibe dans nos cinémas) a été séché pour avoir un certain point d’humidité (environ 14 %). Lorsqu’il est chauffé, l’eau emprisonnée à l’intérieur se transforme en vapeur et, à la bonne température, soit environ 100 degrés Celsius, il finit par faire éclater le grain. Pop. Corn. Fin de l’exposé scientifique.
4. Le maïs corné
Plus dur, d’où le nom subtil, il possède une vaste palette de couleurs qui en fait un beau sujet de conversation sur votre table de salon. Il est utilisé notamment dans la semoule ou le gruau, ou pour donner un look granola / Woodstock / chaman à votre 3 1/2 pas chauffé.
Et pour terminer, deux autres catégories qui ne sont pas vraiment des catégories :
Le maïs génétiquement modifié
La grande majorité des cultures génétiquement modifiées (GM) de maïs sont destinées à l’alimentation animale, ce qui n’a vraiment rien de rassurant si vous mangez de la viande. Cependant, il est toutefois possible et même probable de trouver du maïs GM dans votre panier d’épicerie, parce que, on vous le rappelle, le maïs est partout et aussi parce que le maïs GM est utilisé dans les produits transformés.
Le maïs miniature
Finalement, le maïs miniature qu’on a tous fait semblant de manger comme un épi pour faire ricaner les enfants n’est pas un type de maïs fabriqué en laboratoire coréen, mais bien un « bébé » maïs que l’on cueille avant maturité et que l’on mange entier. Si vous êtes troublé à l’idée de dévorer des bébés, il paraît qu’on en fait autant avec certains animaux.
1. ON PEUT LE CUIRE DE DIFFÉRENTES FAÇONS
Il existe plusieurs façons de cuire le blé d’Inde : sur le grill, au micro-ondes, au four, à la loupe géante pendant une éclipse solaire, mais notre chef charmeur Patrice Gosselin préconise une méthode plus simple : « Tu le fais cuire une dizaine de minutes dans l’eau bouillante. Et lorsqu’il y a une bonne et franche odeur de blé d’Inde, c’est que c’est prêt. Sérieux. »
Par ailleurs, une variante intéressante de cette méthode de cuisson — que nous avons eu le privilège de déguster — nous provient de Johanne de Repentigny, qui met ses épis debout dans un chaudron, dans très peu d’eau, et les recouvre pour les faire cuire à la vapeur une dizaine de minutes. Un délice.
Finalement, si vous vous demandez quoi faire avec vos épis, sachez que vous pouvez en faire un bouillon savoureux (puisqu’on vous le dit). Vous pouvez vous en servir afin de nettoyer le grill de votre barbecue. Et une fois bien sec, ils sont d’excellents projectiles biodégradables pour éloigner les #$%?& d’écureuils de votre jardin.
On le mentionne, au cas.
(Publié le 7/08/2020)