Les compagnies high-tech ont ce don de nous faire rêver à un monde meilleur.

Des autos qui se conduisent toutes seules ! Une colonie sur la Lune ! De la télévision intelligente ! Un vaccin !

Mais c’est un rêve beaucoup plus tangible et comestible que propose la compagnie Apeel : des fruits et légumes qui ne moisiront pas si rapidement dans votre frigo ou dans votre beau bol quétaine en forme de banane sur votre table de salle à manger, que vous n’utilisez jamais.
En effet, la firme californienne propose une solution toute simple pour ralentir le dépérissement alimentaire et cette déception foudroyante que nous vivons tous quand nos bleuets goûtent soudainement le diable : l’ajout d’une fine couche de protection à base végétale sur la surface des produits frais pour ralentir la perte d’eau et l’oxydation, qui sont les facteurs-clefs qui causent la détérioration.

Avant de partir en peur, on tient à vous rassurer : il semblerait que la compagnie n’utilise PAS du Pledge au citron pour ce processus révolutionnaire, mais plutôt ce qu’elle appelle une couche « composée de matières végétales — lipides et glycérolipides — qui existent dans les pelures, les graines et la pulpe de tous les fruits et légumes que nous mangeons ».

Donc, en gros, du gras végétal (ils ne veulent clairement pas utiliser le terme), le tout déjà testé et approuvé par la U.S. Food and Drug Administration.
Les résultats sont franchement impressionnants, avec des tomates et des avocats qui durent un mois — et on sait à quel point il est difficile de trouver un bon avocat quand on en a besoin (insérer bruit de tambour ici).
Tellement impressionnant, en fait, qu’Oprah Winfrey et Katy Perry, toutes deux très impliquées dans la cause environnementale, n’ont pas hésité à investir dans la compagnie.

Car sous cette petite couche d’innovation se cache un problème monumental : le gaspillage alimentaire.

Selon une récente étude scientifique du groupe Project Drawdown qui vise à réduire les gaz à effets de serre, « environ un tiers de la nourriture dans le monde n’est jamais consommée, ce qui signifie que les terres, les ressources utilisées et les gaz à effet de serre émis pour les produire n’étaient pas nécessaires ».
De plus, le World Wildlife Federation estime que 11 % des émissions de gaz à effet de serre créées par le système alimentaire pourraient être éliminées par l’éradication des déchets alimentaires.

Aux États-Unis seulement, la production d’aliments gaspillés génère l’équivalent en émissions de gaz à effet de serre à…. 37 millions de voitures.

Apeel, qui a bouclé sa première ronde d’investissement à 250 M$, a déjà commencé à commercialiser son produit sur des avocats aux États-Unis et récemment en Europe.
La seule question qui demeure : dans ce nouveau monde polarisé et post-pandémique (enfin, presque), les consommateurs vont-ils faire confiance à la science ?

Après tout, si on ne peut même plus se fier à de la poudre pour bébé

(Publié le 29/05/2020)