En 1896, on vendait un sirop contre la toux à base d’héroïne.  On recommandait de se coucher dans une carcasse de baleine pour soulager ses rhumatismes. Et un chimiste américain du nom de Wilbur Olin Atwater « introduisait » la calorie alimentaire.

Grâce à ses expériences plutôt primitives — qui incluaient servir de l’alcool à des étudiants dans un sous-sol, les faire pédaler et suer dans une chambre calorifique aux murs d’eau et par la suite brûler leur matière fécale (sans blague) —, il en venait à des conclusions qui nous guident encore aujourd’hui, soit : un gramme de protéine et un gramme de glucide produisent chacun quatre calories d’énergie, alors qu’un gramme de gras en produit neuf ; la fameuse règle du 4-4-9.

Depuis, le sirop miracle a été retiré du marché en 1920 et l’aspirine s’est avérée plus pratique pour combattre les rhumatismes. Mais la science des calories, qui date de plus de 100 ans, continue de régner sur tout ce qu’on cuisine et consomme, affichée sur tous nos emballages, comme une règle scientifique infaillible et indiscutable : une calorie est une calorie, peu importe d’où elle vient.

Cette fixation calorique intransigeante a mené à une lutte farouche contre le gras dans les années 70… pendant que des produits toujours plus sucrés envahissaient nos tablettes.  Constat indéniable aujourd’hui : on peut parler d’un « epic fail », car le monde est nettement plus gros. En TA. Selon l’Organisation mondiale de la Santé, entre 1975 et 2016, l’obésité a triplé sur la planète, atteignant 641 millions de personnes. Et voilà que des études récentes démontrent que la logique calorique de « brûler ce qu’on consomme » pour perdre du poids ne serait vraiment pas aussi simple que cela.  D’autres facteurs comme le moment où l’on mange, le sommeil, la diversité de notre alimentation, notre flore intestinale ou encore la consommation d’aliments crus ou cuits auraient un impact direct sur l’apport calorique.

De plus, une récente étude démontre que certaines personnes seraient génétiquement prédisposées à être obèses (à l’inverse, on connait et déteste tous cette personne de notre entourage qui bouffe comme un Viking sans jamais prendre une-maudite-once-de-poids). Et finalement, soulignons que même la compagnie Weight Watchers a reconnu que les calories étaient dépassées en proposant plutôt un système de points, qu’ils ont d’ailleurs raffiné en 2017.

Bref. Après plus d’un siècle d’obsession sur les calories, il serait grand temps de passer à autre chose.

Car les résultats de cette science victorienne ne font visiblement plus le poids.

(Publié le 23/08/2019)